vendredi 5 novembre 2010

Les « droits de l’homme» au Vietnam : une machine de guerre contre l’Église

L'Église catholique au Vietnam est, depuis 1954 au nord, depuis 1975 au sud, une Église persécutée. La persécution prend diverses formes : des camps de rééducation (qui existent toujours) ; des restrictions draconiennes, étouffantes, pour la presse et l'édition catholiques ; des quotas imposés pour les admissions au séminaire et dans les ordinations ; un contrôle idéologique des nominations épiscopales, et aussi des limitations et restrictions imposées au culte catholique dans ses manifestations extérieures : processions, pèlerinages, enterrements.
Cette persécution peut prendre des formes violentes. Églises d'Asie (EDA), le bulletin de l'agence d'information des Missions Étrangères de Paris, nous apprend qu'un fidèle de la paroisse de Côn Dàu, est mort le 13 juillet dernier, après avoir été matraqué par les forces de police. Ce catholique, Nguyên Nam, jeune père de famille, avait fait partie, le 4 mai précédent, du service d'organisation d'un cortège funéraire qui avait donné lieu à de graves incidents. La police avait cherché à interdire l'entrée du cimetière au cortège funéraire, il s'en était suivi un affrontement violent et des dizaines d'arrestations.
Le conflit entre les autorités et la paroisse de Côn Dàu est ancien. Il a pour origine un projet immobilier de la municipalité qui a décrété zone constructible un vaste espace - plus de 100 ha au total - pour lequel des investisseurs étrangers se sont déjà portés acquéreurs. La zone convoitée comprend l'église de Côn Dàu et son cimetière, qui seraient rasés, et aussi des habitations et des terres cultivées. Les résidents de l'endroit ne veulent pas être expulsés.
Autre conflit récent : celui qui a opposé l'archevêque de Hanoï, Mgr Joseph Ngo Quang Kiet, et le gouvernement. L'archevêque, défenseur des libertés de l'Église, a dû démissionner, officiellement pour raisons de santé - il n'a que 58 ans. Il a été remplacé par un autre évêque, considéré comme plus conciliant à l'égard du régime. L'historien italien Sandra Magister, sur son site Chiesa.espresso, rapporte le fait suivant, très significatif : « Dans sa “Lettre d'adieu” au diocèse de Hanoï, qu'il a quitté le 12 mai, [Mgr] Kiet précisait qu'il avait renoncé au diocèse “pour le plus grand bien de l'Église et, plus concrètement, pour celui de notre diocèse de Hanoi”. Dans le même texte, l'archevêque démissionnaire rappelle qu'il a vécu des “moments de tempête” où “notre vie était menacée”, Et il considère son départ comme “conforme à la volonté de Dieu”, sûr que “ce sera un bien pour moi et pour vous”. Mais - et le fait mérite d'être souligné - dans sa lettre, Kiet ne fait aucunement allusion aux raisons de santé communément avancées pour expliquer qu'il ait renoncé à diriger un diocèse aussi important que celui de Hanoï. »
La persécution de l'Église catholique par les régimes communistes trouve sa justification dans la théorie marxiste selon laquelle la religion est l'« opium du peuple », une « superstructure » qu'il faut éliminer pour pouvoir véritablement changer la société. La religion fait partie des aliénations à combattre et à éradiquer.
La tartufferie des droits de l'homme
Mais les autorités vietnamiennes se rendent compte que cette dialectique, brutale, ne suffit plus pour légitimer leurs. actions contre l'Église. À Hanoï, une nouvelle revue officielle vient de paraître, à l'initiative du gouvernement vietnamien. C'est un magazine qui s'intitule Les Droits de l'homme du Vietnam. Le premier numéro est paru le 14 juillet dernier. Le vice-Premier ministre du Vietnam, Pham Gia Khiem, membre du Bureau politique du Parti communiste Vietnamien (PCV), a fait savoir que cette nouvelle publication avait pour but de contrecarrer les « forces hostiles [qui] ne cessent de profiter des questions de démocratie, de droits de l'homme, de religion ou de nationalité pour calomnier, dénaturer et s'immiscer dans les affaires du pays ».
Un autre dignitaire du régime, le général Nguyên Van Huong, membre du Comité central du PCV et secrétaire d'État au ministère de la Sécurité publique, trace, dans le n° 1 de la revue indiquée, la ligne idéologique. Au Vietnam, écrit-il, « le peuple jouit d'une totale liberté de croyance et de religion ».
Mais il ne s'agit pas de n'importe quelle religion. La « religion authentique », écrit le général, est celle qui apprend aux hommes « la véritable solidarité » et les « droits du peuple ».
Autant dire que la religion catholique ne peut être acceptée que si elle est soumise aux impératifs et objectifs du Parti communiste vietnamien. Le secrétaire d'État écrit à propos de la liberté religieuse : « nous empêchons que des intrigants l'utilisent à des fins politiques pour saboter l'union nationale ».
Les 6 millions de catholiques vietnamiens sont prévenus : au nom des droits de l'homme, et de l'« union nationale », le gouvernement communiste continuera à les contrôler, à les limiter dans l'exercice de leur culte et à les persécuter.
Yves Chiron Present du 14 août 2010

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